«Je suis K.O. dans mon lit, je ne peux rien faire»: maigrir grâce à Ozempic passe de tabou à viral

Dans la dernière année, Ozempic est passé de sujet tabou à phénomène viral. À l’origine conçu pour traiter le diabète, il s’est imposé sur les réseaux sociaux comme une solution à la perte de poids, soulevant espoir et controverse.
«Ce n’est pas la solution pour la personne qui a 20 livres à perdre avant l’été. C’est vraiment si tu sens que ton poids est une limitation au quotidien […] ou que tu as des problèmes liés à ton poids, par exemple du diabète», témoigne Émilie Gagnon.
L’enseignante au primaire est en surpoids depuis aussi longtemps qu’elle se souvienne. À 26 ans, elle pesait 317 livres. Grâce à Wegovy, un médicament GLP-1, comme Ozempic, elle a perdu 70 livres en huit mois.
«J’ai toujours été disciplinée dans l’entraînement, mais j’avais plus de difficulté au niveau de l’alimentation. Wegovy venait vraiment m’aider à contrôler certaines pulsions», raconte la Sherbrookoise, qui s’est fait proposer le médicament par son médecin comme solution de rechange à une chirurgie bariatrique.
Photo AUDREY RUEL-MANSEAU
Ozempic, Wegovy, Mounjaro sont des médicaments injectables de la famille des agonistes GLP-1. Initialement conçus pour traiter le diabète, leur effet coupe-faim a fait exploser leur utilisation partout dans le monde.
En 2019, plus de 72 000 Canadiens se sont tournés vers des médicaments GLP-1 pour perdre du poids. En 2023, ce nombre a bondi à plus de 500 000, selon les données de l’IQVIA. C’est sept fois plus en quatre ans.
«Je vais me faire juger»
Justine (nom fictif) a vécu une perte de poids aussi spectaculaire que difficile avec le médicament Mounjaro. Elle pesait 248 livres et, en trois mois, elle a perdu 35 livres.
«J’ai beaucoup de symptômes dans les 72 heures après l’injection. J’ai beaucoup de nausées, de la fatigue extrême», raconte la femme de 28 ans, dont la vie sociale écope.
«Aller bruncher le dimanche matin, oublie ça. Je suis K.O. dans mon lit, je ne peux rien faire», dit-elle, d’autant plus que ses amies ne sont pas au courant de sa démarche. Seuls son conjoint et ses parents sont dans le secret.
«D’un, si je paye 500$ par mois pour ça, je me suis dit: “C’est sûr que je vais me faire juger.” Et de deux, le monde va penser que je prends la solution facile», évoque-t-elle, alors que sa santé était pourtant mise à risque par son obésité de classe 3.
Photo AUDREY RUEL-MANSEAU
Révolution médicale
L’Organisation mondiale de la santé a reconnu cet automne que cette nouvelle option révolutionne le traitement de l’obésité: une maladie chronique qui touche plus de 1 milliard de personnes dans le monde.
«Ç’a changé notre pratique, ça a changé notre façon de faire. Au niveau scientifique, on a des bénéfices: pour le diabète, pour la perte de poids…» témoigne Dre Marie-Philippe Morin, spécialiste en médecine interne et bariatrique.
«Dans notre coffre à outils, auparavant, on avait la chirurgie bariatrique et les habitudes de vie. Maintenant, on a aussi de plus en plus de médicaments qui sont sur le marché», ajoute-t-elle.
Pas de solution miracle
En 2025 plus que jamais, Ozempic et autres GLP-1 sont devenus un phénomène mondial, massivement porté par les réseaux sociaux. Mais la promotion du produit par des célébrités, les milliers de témoignages sur internet et l’accessibilité au médicament ne sont pas sans risques. Attention aux dérives, prévient Dre Morin.
«Ce sont des médicaments qui ne doivent pas être utilisés pour des fins esthétiques. Ce sont des médicaments qui doivent être utilisés pour répondre à une problématique de santé, ou dans des obésités importantes chez des gens qui ont des problèmes de santé», prévient Dre Morin.
Elle ajoute qu’«on ne devrait pas considérer ces options-là comme des baguettes magiques, surtout pas en gestion de l’obésité». Ce à quoi acquiesce Émilie Gagnon, qui s’entraîne trois fois par semaine, en plus de faire de la natation et des compétitions sportives.
«Ça peut avoir un effet vicieux parce que je pense à des jeunes filles sur TikTok qui peuvent se référer aux célébrités, qui voient qu’elles ont perdu du poids rapidement avec Wegovy ou Ozempic, et qui se disent que c’est la solution miracle. Il y a aussi du travail à faire et ce n’est pas si facile», témoigne la Sherbrookoise, qui a documenté son processus de perte de poids sans filtre ni tabou sur TikTok.
L’utilisation des GLP-1 pour la perte de poids est là pour de bon. Ozempic perd son brevet en janvier 2026, ce qui entraînera l’arrivée de marques génériques sur le marché, à meilleur prix, donc encore plus accessibles.


