La Presse | Le regard d’Olivier Jean s’éteint

Le photojournaliste de La Presse Olivier Jean est mort à l’âge de 48 ans. Figure respectée du milieu, il laisse le souvenir d’un professionnel d’un immense talent et d’un collègue d’une grande humanité.
Publié à 5 h 00
Réunis mercredi par le vice-président Information et éditeur adjoint de La Presse, François Cardinal, les membres de la rédaction ont appris la nouvelle dans une atmosphère lourde d’émotion.
Une minute de silence a été observée en pensant à la famille et aux proches d’Olivier.
« C’était une personne d’une immense bonté, d’une grande sensibilité, qui était là pour tout le monde, tout le temps, a dit François Cardinal. Un grand talent, reconnu non seulement par ses collègues, mais aussi par ses pairs. »
Carrière de plus de 25 ans
Olivier Jean travaillait à La Presse depuis 2013. Avant de se joindre à l’équipe, il avait amorcé sa carrière au Journal de Montréal en 1999, puis œuvré pour l’agence Reuters et divers magazines. En plus de 25 ans de métier, il a couvert de nombreux moments marquants de l’actualité québécoise : les manifestations étudiantes de 2012, le déraillement de Lac-Mégantic, l’incendie de L’Isle-Verte, l’attentat de la grande mosquée de Québec et la pandémie de COVID-19, notamment.
PHOTO VINCENT LAROUCHE, ARCHIVES LA PRESSE
Olivier Jean lors d’un reportage dans les territoires palestiniens, en 2023
Au-delà des grands évènements, il s’intéressait surtout aux gens. Ces dernières années, il s’était particulièrement consacré à documenter la vie dans les communautés autochtones et inuites. Son regard, à la fois lucide et bienveillant, faisait ressortir la dignité et la lumière même dans les réalités les plus dures.
PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE
Olivier Jean lors de la couverture de la première séance d’essais libres du Grand Prix du Canada, en juin 2024
Pour Jean-François Bégin, directeur principal de l’information, Olivier Jean était un photojournaliste d’exception, au style unique, mais aussi un collègue profondément humain.
C’était un grand sensible. Il avait une façon de faire parler les images qui était unique. Tu reconnaissais tout de suite une photo d’Olivier Jean : c’était une signature.
Jean-François Bégin, directeur principal de l’information de La Presse
Il se rappelle aussi un journaliste passionné : « Il s’investissait complètement dans les histoires, même les plus difficiles. C’était un grand, grand passionné dans tout ce qu’il faisait. »
PHOTO JOHN MAHONEY, ARCHIVES THE MONTREAL GAZETTE
Olivier Jean lors d’un match du Canadien de Montréal au Centre Bell
David Boily, directeur de la photo et ami de longue date, parle d’un créateur d’une intensité rare.
« La Presse a perdu un immense talent, un innovateur, un travaillant. Il n’y en avait pas deux comme lui. Dès que je voyais une photo d’Olivier, je le savais tout de suite. Il avait un don pour faire du beau avec n’importe quoi. C’est aussi la personne la plus aidante que j’aie connue. Il donnait, donnait, donnait tout le temps. »
Primé à maintes reprises
Son talent a été largement reconnu à l’extérieur de la salle de rédaction. Olivier Jean a remporté à plusieurs reprises le prix Antoine-Desilets de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, ainsi que le prix de la photo de sport de l’année au Concours canadien de journalisme, en avril dernier, pour son cliché montrant un moment de joie entre Andre De Grasse et Aaron Brown aux Jeux olympiques de Paris.
PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE
Cette photo d’Olivier Jean a remporté le prix de la photo de sport de l’année au Concours canadien de journalisme.
Ses proches décrivent un « gars » entier, passionné et vrai.
« On a commencé notre carrière ensemble. Ça fait 25 ans que je le connais. En plus d’être un top photographe, c’était un humain exceptionnel, raconte Patrick Sanfaçon, photographe à La Presse.
« C’était un bon vivant, un chialeux, mais dans le fond, il disait tout haut ce qu’on pensait tout bas. C’était quelqu’un d’authentique, immensément intelligent. Des fois, c’était du pur génie, carrément. »
Son ami et collègue François Roy partage le même souvenir d’un être profondément sensible.
« Oli au travail et Oli dans la vie, c’était la même grande sensibilité. Il avait une capacité sociale incroyable. Que ce soit dans les faits divers, sur une réserve autochtone ou aux Olympiques, il mettait tout le monde à l’aise. »
François Roy évoque aussi son instinct et sa lucidité rares.
« Il était tout le temps à l’avance, il savait ce qui s’en venait, dit-il. C’était le meilleur photographe de l’équipe. Et ça, je l’ai dit de son vivant. Je ne suis pas en train de le mettre sur un piédestal parce qu’il n’est plus là.
« C’était un caméléon, il s’ajustait à toutes les situations. C’était zéro calculé de sa part : il était juste lui-même. »
Au fil de ses reportages comme de ses rencontres, Olivier Jean laisse le souvenir d’un homme vrai, d’un collègue attentionné et d’un grand photographe.



