Idées | La science comme partie intégrante de l’économie

Le contexte nord-américain a abruptement changé sur le plan économique et des relations commerciales avec la venue du nouveau gouvernement américain. Le gouvernement du Québec doit composer avec cette nouvelle réalité qui exerce une pression sur notre économie. En fait, les gouvernements du Canada et du Québec ont exprimé l’importance de redessiner l’économie pour répondre aux nouveaux défis mondiaux. Nous croyons fermement que la recherche scientifique et la science doivent en être partie intégrante.
Il nous faut un engagement fort envers la science, contraire à ce qui se passe au sud de nos frontières, où l’écosystème de la recherche scientifique est mis à mal avec des coupes radicales dans les budgets de recherches et d’universités, dans le personnel scientifique ou dans les données, notamment sur le climat. Une atmosphère morose s’est installée dans les établissements et les laboratoires aux États-Unis.
On connaît l’importance de la recherche et développement (R&D) dans le développement économique et social d’un pays ou d’une région. Les laboratoires et les centres de recherche dans nos universités et nos collèges sont en effet de véritables PME de production de savoirs validés et d’accélération de l’innovation, des lieux sans pareil de formation de notre future main-d’œuvre hautement qualifiée.
Le Québec s’est donné une capacité de recherche en milieu universitaire qui s’avère payante aujourd’hui avec la qualité de ses publications scientifiques qui ont beaucoup d’impact. De plus, le Québec compte des pionniers notamment en apprentissage profond, une branche de l’intelligence artificielle, en édition génomique avec le système CRISPR-Cas9 ou en identification de facteurs génétiques prédisposant à telle ou telle maladie.
Au-delà de ces faits d’armes, l’histoire nous apprend que la science améliore notre quotidien, que ce soit dans l’éducation de nos enfants, nos soins de santé, notre travail, nos loisirs, nos déplacements, nos tâches domestiques, nos communications, nos plateformes d’information, etc. La recherche universitaire est en effet à l’origine de découvertes qui améliorent ou sauvent des vies, qu’on pense à celles de gènes de prédisposition qui conduisent à des tests diagnostiques pour prévenir un cancer ou une maladie cardiovasculaire.
Les découvertes scientifiques peuvent aussi conduire à de nouveaux produits et procédés, et par là même ouvrir de nouveaux marchés. Qu’on pense à l’ARNm et à la création du marché des vaccins ARNm ou à l’apprentissage profond qui a mené à la création d’outils de prise de décision dans le nouveau marché en croissance du deep learning. L’industrie laitière mesure aujourd’hui l’apport considérable de la science avec la mise au point des bactéries CRISPR-Cas9 pour combattre les virus qui affectaient grandement la production de yogourts et de fromages.
Par ailleurs, notre recherche industrielle n’est pas en reste, propulsée par des milliers d’entreprises faisant partie de regroupements sectoriels de recherche industrielle, dans des domaines aussi stratégiques que l’aluminium, l’aérospatiale, la bioéconomie, la biopharmaceutique, l’énergie électrique, les matériaux avancés, les technologies de l’information, des communications et du numérique, les technologies de la santé et la transformation métallique. Bon an, mal an, ces regroupements génèrent des centaines de brevets et de licences et implantent ou commercialisent autant de solutions, procédés ou technologies. Les retombées de cette recherche contribuent à la croissance économique et aux diverses facettes de notre vie quotidienne, sans qu’on s’en rende toujours compte.
Nécessaire à la compréhension de notre monde et utile pour générer des innovations et créer de la richesse, la science jouit de surcroît de la confiance de nos concitoyens et concitoyennes. Il est rare de les entendre dire qu’on investit trop en recherche !
En fait, pourquoi n’investissons-nous pas davantage en R&D, car c’est sur ce plan que le bât blesse ? Selon les plus récentes données de l’Institut de la statistique du Québec, nos dépenses en R&D en pourcentage du PIB sont depuis quelques années en diminution constante, pour s’établir à 2,29 %, contrairement aux pays de l’OCDE, où elles croissent, s’élevant à 2,73 %.
Il faut bien sûr poursuivre le financement de la recherche universitaire, mais aussi stimuler les dépenses en R&D en entreprise, qui ne représentent que 1,34 % du PIB au Québec, contre 2,01 % en moyenne des pays de l’OCDE, au sein de laquelle se retrouvent nos principaux partenaires commerciaux. Quand on sait que la R&D est un avantage concurrentiel pour une économie, les écarts dans son financement qui s’accentuent entre le Québec et les pays de l’OCDE sont pour le moins inquiétants.
La Stratégie québécoise de recherche et d’investissement en innovation du gouvernement du Québec va certes dans la bonne direction, mais il faut appuyer sur l’accélérateur et faire bouger l’aiguille de l’investissement en R&D. Il faut éviter que la recherche universitaire et industrielle soit dans l’angle mort de la vision de l’économie pour le Québec : elle doit au contraire faire partie des priorités gouvernementales. Si le Québec est bien pourvu en matières premières, il l’est aussi en matière grise et en expertises scientifiques. Il ne tient qu’à nous de mettre les efforts nécessaires et d’en tirer les bénéfices pour le bien commun.




