Chronique de François Gagnon : Suzuki et Caufield sur les traces du duo Toews-Kane

MONTRÉAL – Parce que Nick Suzuki et Cole Caufield n’ont pas orchestré trois conquêtes de la coupe Stanley en six ans, il est un brin prématuré de les comparer à Jonathan Toews et Patrick Kane qui ont réussi cet exploit avec les Blackhawks de Chicago en 2010, 2013 et 2015.
Mais assurer, comme l’a fait Lane Hutson après la victoire de 3-2 du Canadien en prolongation, que la complicité qui unit son capitaine au meilleur franc-tireur du Canadien lui rappelle celle qui unissait le duo Toews-Kane alors qu’il faisait des Hawks l’une des meilleures formations de la LNH est tout à fait justifié.
Est-ce que cette complicité Suzuki-Caufield guidera le Canadien jusqu’à la 25e coupe Stanley de son histoire? Est-ce que cette osmose entre les deux leaders offensifs du Tricolore permettra de la soulever trois fois en cinq ans?
Impossible de regarder aussi loin dans le temps.
Mais là, maintenant, le duo Suzuki-Caufield guide le Canadien vers des victoires. Et il le fait avec brio.
« Ils sont le fun à voir jouer », que Martin St-Louis a convenu dans son point de presse suivant la quatrième victoire consécutive de son équipe. Une quatrième victoire en cinq matchs cette saison.
Un gain que les jeunots du Canadien ont arraché des mains des vieux Predators alors que Cole Caufield a nivelé les chances avec 20 secondes à faire en troisième pour pousser le match en prolongation. Une prolongation au cours de laquelle Suzuki et Caufield ont pris possession de la patinoire. Le capitaine a frappé la barre horizontale en plus d’ajouter une autre excellente occasion de marquer. Mais c’est son petit complice et grand marqueur qui a fait la différence avec deux petites secondes à écouler à la prolongation.
C’était le deuxième but du match de Caufield. Son cinquième de la saison. Mais aussi, et surtout, un but gagnant enfilé en prolongation dans une deuxième rencontre de suite.
Caufield se réveille ce matin au deuxième rang des meilleurs francs-tireurs de la LNH avec cinq buts. Il a aussi rejoint Howie Morenz et Max Pacioretty au premier rang de l’histoire du Canadien avec 10 buts en prolongation. Un record que Caufield n’améliorera peut-être pas dès samedi lors de la visite des Rangers de New York, mais dont il sera le seul titulaire dans un avenir pas trop lointain…
« C’est pour ça qu’on joue jusqu’à la fin! » Cole Caufield répond aux questions de Marc Denis après la victoire des Canadiens en prolongation face aux Predators.
Deux tirs bloqués ont mené au but gagnant
Martin St-Louis avait raison de dire après le match que le duo Suzuki-Caufield est beau à voir aller sur la patinoire.
Mais il a aussi souligné à quel point ces deux joueurs tendent à être complets en plus d’être dangereux offensivement. Et ça, c’est tout à l’honneur de l’entraîneur-chef qui travaille depuis son arrivée à la barre du Canadien pour justement rendre ses joueurs meilleurs dans toutes les facettes du jeu.
Avant d’unir leurs efforts pour marquer le but qui a fait bondir leurs partisans de leurs sièges et soulever le toit du Centre Bell, Suzuki et Caufield ont contribué à la cause de leur équipe en bloquant deux tirs de Steven Stamkos.
Caufield l’a fait 47 secondes avant de marquer, Suzuki 35 secondes avant le but gagnant.
Le genre de jeu qui passe trop souvent inaperçu, mais qui parfois, souvent même, fait une grosse différence entre la victoire et la défaite.
En plein le genre de jeu qui a fait de Jonathan Toews et Patrick Kane les piliers qu’ils ont été au fil de leurs 16 saisons avec les Blackhawks à Chicago.
Nick Suzuki et Cole Caufield sont encore loin des trois coupes Stanley soulevées par Jonathan Toews et Patrick Kane. Les 125 buts et 363 points récoltés par le capitaine en 363 matchs depuis l’arrivée de Caufield (122 buts, 225 points en 292 parties) à ses côtés ne font pas encore le poids avec les 883 et 1225 points récoltés par Jonathan Toews et Patrick Kane.
Mais quand on compare les moyennes en carrière sur 82 matchs présentées par le site spécialisé hockey-reference.com, on se rend compte qu’il est peut-être prématuré, mais loin d’être saugrenu de dresser des comparaisons entre les quatre joueurs. Du moins sur le plan statistique.
Nick Suzuki affiche une moyenne de 25 buts et 68 points pour 82 matchs disputés. Jonathan Toews? Il domine légèrement le capitaine du Canadien avec une moyenne de 29 buts par saison. Mais les deux joueurs présentent une moyenne de points (68) identique.
Patrick Kane (31 buts, 85 points en moyenne en 82 matchs) est loin devant Caufield en matière de points (63), mais Caufield le devance au chapitre des buts (34 contre 31 en moyenne sur 82 matchs).
Comme toutes les statistiques, on doit les analyser avec prudence. Car les moyennes de Toews et Kane ont fluctué à la baisse puisqu’ils ont ralenti au cours des dernières saisons. Mais ce qui est intéressant dans tout ça, c’est que Suzuki et Caufield sont toujours en ascension. Ils n’ont pas encore atteint leurs pleines capacités. Ce qui a de quoi réjouir le Canadien et ses partisans.
Hutson sur les traces de Duncan Keith?
Parce que Lane Hutson a ravivé les souvenirs de la grande époque des Blackhawks en dressant un parallèle entre Jonathan Toews et Patrick Kane qu’il épiait quand il était enfant et ses actuels coéquipiers avec le Tricolore, pourquoi pas ne pas continuer dans la même veine en comparant le petit arrière du Canadien au très grand Duncan Keith?
Je sais : c’est grossièrement prématuré! Mais Hutson, encore jeudi, a été rien de moins que magistral sur la patinoire.
Et sur le but qui a permis de pousser le match en prolongation, Hutson s’est permis de d’abord voler un but à Jonathan Marchessault en se dressant devant la cage du Canadien alors que Jakub Dobes avait été rappelé au banc, avant d’effectuer une passe savante jusqu’à la ligne bleue adverse où il a rejoint Cole Caufield qui a marqué quelques secondes plus tard.
Incroyable! Hutson bloque le lancer, Caufield marque! Wow! Cole Caufield marque avec 20 secondes à faire après un lancer bloqué important de Lane Hutson et on s’en va en prolongation!
Pour effectuer l’arrêt, Hutson s’est bien plus inspiré du vétéran David Savard comme l’a mentionné Nick Suzuki après le match. Mais la passe servie à Caufield sur le but égalisateur, une passe qui a mis en valeur son talent, sa vision, sa qualité et sa rapidité d’exécution sans oublier le calme qu’il a affiché, eh bien c’est le genre de passe que peu de défenseurs peuvent réussir.
Si Nick Suzuki et Cole Caufield atteignent un jour les niveaux d’excellence de Jonathan Toews et Patrick Kane et qu’en plus, Lane Hutson atteint le niveau d’excellence de Duncan Keith, le Canadien sera le fun à avoir aller pendant bien des années.
Marchessault et ses Preds sidérés
Si Lane Hutson n’avait pas été en mesure de stopper Jonathan Marchessault, si Cole Caufield n’avait pas marqué en fin de troisième et encore en toute fin de prolongation, le Canadien aurait disputé un match solide quand même.
Même s’il avait perdu la rencontre? Oui!
On aurait davantage souligné les très vilains replis défensifs – ou l’absence de replis – de Jake Evans et Patrik Laine sur le but du défenseur Nick Perbix qui a déjoué Jakub Dobes avec un tir que le gardien du CH aurait pu stopper, mais dans l’ensemble, le Canadien a disputé un match solide comme les Predators.
On aurait souligné le manque de cohésion de la première unité d’attaque massive. On aurait remis en question la présence de Juraj Slafkovsky au sein de cette première unité. On aurait soulevé la possibilité que Demidov remplace Slafkovsky. Où que Nick Suzuki et Kirby Dach soient simplement permutés d’unité…
Mais la performance du Canadien dans l’ensemble aurait malgré tout mérité une bonne note malgré un revers.
Et en passant, si je n’ai pas aimé le but accordé à Perbix, Dobes a aussi réalisé plusieurs arrêts solides dans le cadre de sa deuxième sortie de la jeune saison. Il a été meilleur que son pourcentage d’arrêt, 89,5 % (17 arrêts sur 19 tirs) le laisse croire.
Dans le camp des Predators, la perception était toutefois bien différente. Ça paraissait après le match alors que Jonathan Marchessault et ses coéquipiers étaient encore sidérés par la remontée victorieuse de leurs adversaires.
« C’est facile à dire après le match, mais j’aurais peut-être dû patiner un peu plus avant de tirer vers le but. J’aurais compliqué sa job », analysait Marchessault qui a vu Lane Hutson réaliser l’arrêt à ses dépens devant la cage déserte.
Un arrêt qui a tout changé.
« Je n’ai pas marqué, mais je ne comprends pas ce qui est arrivé après. Comment Caufield a pu être laissé seul comme ça à notre ligne bleue? Je ne sais pas », a poursuivi le Québécois qui convient que le Canadien a pris de l’expérience et du chien sur la patinoire.
« Ce n’est pas encore un club élite, mais j’adore leur groupe de défenseurs et le premier trio est vraiment solide. Dans la LNH d’aujourd’hui, tes meilleurs doivent toujours être les meilleurs pour que tu aies une chance de gagner. Ce soir, ils l’ont été. »
Plus loin dans le vestiaire, Steven Stamkos, assis songeur devant son casier dans un vestiaire déserté par tous ses coéquipiers, a souligné le manque à gagner offensif de son équipe.
« Il est difficile de gagner quand tu ne marques que deux buts dans un match. Il faut aller en chercher un troisième et on ne l’a pas fait. On manque de production autant à cinq contre cinq qu’en avantage numérique. Il va falloir travailler très fort sur ces aspects du jeu », que l’ancien capitaine du Lightning a indiqué.
Il est plus loin du Lightning des belles années que la simple distance qui sépare Nashville de Tampa Bay…

